FEUILLETON LITTÉRAIRE
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Dernière mise à jour le 22 juillet 2004

 

 

 

FEUILLETON LITTÉRAIRE

NATACHA SALAGNAC
Passage à Travers, L'Aire, 2003

 

Un récit douloureux

Son sourire irradie sur la couverture. Pourtant, le roman de Natacha Salagnac revient sur une déchirure intime, secrète et douloureuse qui a bouleversé sa vie. Mais comment dire l'indicible ? Et comment aborder, grâce aux mots, cette scène à la fois traumatique et centrale : celle où son père, pasteur dans le Jura, abuse de sa petite fille ? Natacha Salagnac y vient à mots couverts, petit à petit, comme on approche un secret dangereux, qui risque de vous brûler les doigts et les yeux. Elle tourne autour, collecte des photographies, se rend plusieurs fois dans la cathédrale de Chartres pour admirer (et essayer de déchiffrer) la Dormition de la Vierge.

" J'ai dormi toute mon enfance, avoue la narratrice. Anesthésiée, les yeux mi-clos. " L'écriture va lui permettre, enfin, d'ouvrir les yeux et d'affronter l'insupportable. C'est d'abord une présence, qui la poursuit jusque dans son sommeil. C'est ensuite un corps, des yeux qui la déshabillent, des mains qui la touchent. Noli me tangere ! hurle plusieurs fois la narratrice, comme pour éloigner la vision de cauchemar. Sa mère, d'abord, essaie de la protéger des avances paternelles, mais elle abandonne vite la partie, résignée, puis meurt tragiquement dans un accident de voiture (alors que son bourreau survit). Natacha Salagnac raconte ici la peur, la honte, l'impossibilité du pardon. Les sens anesthésiés qui cherchent obscurément dans l'alcool ou les voyages une échappatoire. Mais difficile d'échapper à " cette estampe qui ne peut pas être dite. Parce que j'ai été tuée avant le temps de la parole. Parce que mon corps ne parvient pas à mettre des mots sur sa souffrance. "

Ce Passage à Travers est une lente reconquête de cette parole impossible, dans une écriture à la fois précise et poétique, souple et sans concession face à la vérité des faits (du crime). Dire l'indicible, ce sera, pour Natacha Salagnac, se rendre à nouveau à Travers, avec un ami photographe, dans l'intention de tuer ce père indigne qui file une heureuse vieillesse dans une institution. Retourner là-bas, c'est accepter le crime et exorciser la douleur. Et même si le père est déjà mort, ce retour aux sources (c'est-à-dire à la part refoulée ou méprisée d'elle-même) agira comme une libération.

 

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