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Dernière mise à jour le 22 juillet 2004
FEUILLETON LITTÉRAIRE VITTORIO FRIGERIO
La dernière ligne droite, Éditions du Gref, 1997.
Au bout de la rue, nouvelles, Éditions du Vent d'Ouest, 1995.
La dernière ligne droite
Tessinois d'origine, mais ayant étudié les Lettres à Genève (où il a tenu, pour un temps, une galerie de peinture), Vittorio Frigerio vit maintenant à Toronto. Son dernier livre, qui est aussi son premier roman, par sa structure comme par son contenu, épouse, dirait-on, cette mobilité de vie : il débute à Come, glisse à Milan, puis à Genève (dans l'atelier d'un peintre, Bernard Métral, dont l'œuvre est reproduite dans le livre), fait un saut à Paris, traverse en un clin d'œil l'Atlantique, avant d'aller se perdre dans les méandres de l'Orénoque, en pleine forêt équatoriale.
Comme on le voit, La dernière ligne droite est à la fois une sorte de puzzle et un labyrinthe où le lecteur avance pas à pas, plutôt désorienté que guidé par un narrateur multiple et ironique. Si le puzzle renvoie, par sa structure, aux meilleurs romans policiers (le livre est rempli de tueurs à gage, de belles limousines, de sulfateuses qui crachent un plomb mortel), le labyrinthe, on l'aura deviné, renvoie plutôt aux récits de Borgès : multitude des points de vue, personnages en trompe-l'œil, jeux de miroirs et nombreux apartés ("…je me trouvai pour un temps dans la position enviable dont avaient joui tous les hommes éléphants et les femmes à barbe de cette terre. ")
Ce roman, dont les pièces s'ajointent au fil de la lecture, se lit comme un polar, mais un polar métaphysique et distancié où les meurtres sont subtilement prémédités et commis de sang froid, même si le hasard, quelquefois, met à mal la logique implacable du tueur de doubles.
Il y a, chez Vittorio Frigerio, un sens très sûr de la construction narrative, une multitude de trouvailles (comme ces spéculations autour de la mort de Jim Clark, dans la dernière ligne droite du circuit d'Hockenheim, précisément, qui donnent leur titre au livre) et une finesse de style qu'on trouve rarement dans le roman contemporain. Sans oublier l'humour – élégance suprême du romancier – qui baigne chacune des pages de ce texte étonnant, et souvent jubilatoire. Il est vrai que ces qualités, on les retrouvait toutes, déjà, dans Au bout de la rue, un recueil de nouvelles publié en 1995, et qui reçut le Prix de la ville de La Chaux-de-Fonds et de la revue [vwa].