FEUILLETON LITTÉRAIRE
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Dernière mise à jour le 22 juillet 2004

 

 

FEUILLETON LITTÉRAIRE

ELISABETH GILLE
Le Crabe sur la banquette arrière, Mercure de France, 1994.

 

Dans Le Crabe sur la banquette arrière, Elisabeth Gille tente un autre pari, et sur un autre ton. Ce court texte autobiographique, en forme de pièce de théâtre, traite aussi de la mort, mais de manière ironique, comme pour mieux la tenir à distance. L’auteur nous conte son cheminement, à la fois banal et exemplaire, depuis le moment où elle apprend le retour du crabe, jusqu’à l’opération, puis au traitement qui vont l’en délivrer. Davantage qu’un document (ce sujet douloureux en a déjà inspiré des centaines), le texte d’Elisabeth Gille est un véritable drame — ou une comédie, ce qui est la même chose. Bien sûr, l’auteur raconte ses angoisses, mais surtout elle met en scène la multitude des personnages qui se penchent sur son cas, et qui, tous, y vont de leurs conseils, leurs petits reproches ou leurs condamnations (l’auteur fumait : par conséquent, ce qui lui arrive est normal, la sanction de son vice), leur indifférence déguisée. Les uns, sans vergogne, lui racontent le " traitement de la copine qui s’en est sortie ", les autres celui de " la cousine qui a fini par mourir ".

Mais la partie la plus surprenante du livre est celle qui décrit l’après-coup du traitement, un an plus tard : " à la surprise générale et à la sienne en particulier, la malade est toujours là. Elle sent bien que, pour ses relations comme pour elle-même, la plaisanterie a assez duré. Après un laps de temps pareil, elle devrait être guérie ou morte ". Commence alors la phase peut-être la plus difficile de la maladie : la réinsertion sociale et familiale de celle que tout le monde avait déjà enterrée. La fin du livre, jubilatoire, est aussi une dénonciation de toutes les hypocrisies qui entourent, aujourd’hui encore, une maladie mortelle.

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