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Dernière mise à jour le 22 juillet 2004

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

JEAN-PIERRE PINCEMIN
La theorie des ensembles, in Canal, 1986 - entretien.

JMO – Pour tous ceux qui ont eu l'occasion de voir vos dernières expositions (en particulier celles de la galerie Numaga, à Auvernier, et celle de la galerie Storrer, à Zurich), la surprise, sans doute, a dû être de taille, puisqu'ils y ont découvert un tout autre Pincemin.

D'un format plus petit, et donnant lieu souvent à une sorte d'explosion colorée, les toiles que vous avez montrées différent profondément des toiles auxquelles vous nous aviez habitués... Faut-il parler, à leur propos, de nouvelle peinture ?

Jean-Pierre Pincemin – Ces peintures sont nouvelles, pour moi aussi, car elles ont toutes été faites dans un esprit de découverte – et j'en ai été le premier spectateur : et souvent le premier surpris...

Il s'agissait pour moi, dans ce nouveau projet, de produire non l'exact contraire de ce que j'avais l'habitude de faire, mais de peindre un tableau qui – dans ses fins comme dans ses moyens – ne soit en rien comparable à ce qu'auparavant je me voyais faire.

Depuis plusieurs années déjà, j'avais montré, à la Galerie de France, des peintures " officielles " (constituées de plans réguliers, dont le principe actif était une pulsion du système chromatique à l'intérieur d'un schéma très rigide et d'autres peintures, moins " officielles ", d'un format plus restreint, qui, elles, quasiment improvisées, tendaient au lieu logique de la peinture : à savoir une participation du système de la forme à plusieurs propositions de nature divergente.

J.-M.O. – Comment pourriez-vous définir, aujourd'hui, cette " nouvelle " peinture ?

J.-P.P. - Je crois que cette nouvelle manière de peindre procède en droite ligne de l'enseignement. Dans le projet d'enseignant (puisqu'aussi, désormais, j'enseigne la peinture à l'Ecole des beaux-arts de Poitiers), j'ai le souci et le désir constant de transmettre des méthodes qui s'avéreraient plus justes que d'autres, –c'est-à-dire mieux adaptées. C'est pourquoi il m'a fallu inventer une " logique " qui excuserait mes incompétences (je sais taire peu de choses en termes de métier de la peinture et serait susceptible, aussi, de faire aboutir d'anciens projets que, par paresse, je n'osais élucider.

" D'abord la forme devrait se générer elle-même. Elle dit : Je suis fille de moi-même. Là où elle peut choisir, où une spacialité est créée, elle trouve sa raison d'être. La forme n'a pas d'existence : tant qu'elle n'est pas achevée, elle ignore son avenir. "

Tels sont, en gros, les projets ou hypothèses " pédagogiques " que j'ai pu expérimenter, ces dernières années, d'autant de façons différentes que j'avais d'étudiants.

À cela j'ajouterai une seconde raison : c'est que n'ayant par le passé aucun goût à enseigner ma propre peinture (par trop " incommunicable " par trop " sentimentale "), je légitimais l'actualité. Il est plus facile de faire comprendre le passé par le présent – que l'inverse ! Et, pris à mon propre jeu, je ne pouvais rester insensible aux modifications profondes qu'a connues la peinture, surtout au début des années 80.

Ce n'est que récemment, pour en finir avec des méthodes d'analyse héritées de la Renaissance, que j'ai commencé à prendre en compte ce qu'on appelle un peu vaguement, dans les classes élémentaires, la théorie des ensembles.

Le principe en soi semblait intéressant. En l'appliquant à la peinture on s'aperçoit qu'il génère des formes imprévisibles. Il permet d'expliquer, entre autre, l'œuvre de Léger dont une partie importante est vérifiable Si l'on admet, par exemple, que ce qui fait la forme tient un peu de ce que l'on appelle en physique les tensions superficielles, et dont l'exemple le plus connu est la goutte d'eau : il suffit d'une molécule de plus ou de moins pour modifier cette forme très fragile, et transformer totalement cette tension, au point qu'alors la goutte explose...

De même il y a, dans l'œuvre de Léger, certaines toiles parfaitement incongrues, sur lesquelles une analyse classique n'a pas de prise, qui demeurent désespérément impénétrables... Alors qu'envisagée dans le processus des ensembles, cette œuvre qui est toute de mobilité trouve son intelligence et sa raison.

J.-M.O. – Quels sont les autres peintres qui, dans cette lignée, ont le plus contribué à cette nouvelle orientation de votre peinture ?

J.-P.P. - Celui dont au moins une œuvre est, de toute évidence, constituée par ce principe d'ensemble, c'est Picasso.

L'œuvre en question, c'est, je crois, une série de lithos marquées de plusieurs points, à l'encre noire, que Picasso a ensuite rejoints entre eux par des droites, rendant ainsi ridicule et désuet ce que l'on a pu appeler la recherche dans l'art moderne. La peinture de Picasso mériterait que l'on s'attarde davantage sur les processus purement générateurs que sur l'anecdote biographique... Car chaque tableau recèle (et sécrète) mille solutions, dont la plus achevée est souvent aussi la plus difficile à produire : à mettre au jour.

Mirò est un peintre dont j'ai fait la découverte dans la même phase de ce travail de réflexion sur la peinture, et j'ai mieux compris, peu à peu, les raisons de la spacialité de certains de ses tableaux. Mais encore Klee, et Dubuffet, et même des œuvres conventionnellement reconnues, comme celle de Pollock par exemple, mériteraient une plus ample revisitation...

J.-M.O. – Quels seraient les objectifs de cette nouvelle peinture ?

J.-P.P. - Les tableaux d'aujourd'hui ont servi à révéler ou à réaliser, en moi, quelqu'un dont j'ignorais jusqu'ici l'existence. De même que cette peinture ne dit plus la même chose, de même le mode sur lequel je travaille maintenant m'oblige à autre chose, pour laquelle les tableaux que j'ai pu faire précédemment ne sont plus d'aucune utilité.

Dans les Véronèse de la Frick Collection, par exemple, je ne voyais autrefois que des rapports de tonalité, dans une combinaison un peu géométrique des formes, alors que maintenant je n'y vois plus qu'un enchevêtrement d'ensembles : le tableau est organisé en rythmes, en petits groupes, et pas du tout en structures particulières à la peinture Renaissance.

J.-M.O. - De quoi se composent les " ensembles " de cette nouvelle manière de peindre ?

J.-P.P. - Le princIpe " cosmique " de cette peinture repose sur une certaine fluidité du regard et une certaine mobilité à penser le monde.

Regardez le ciel, par exemple, et les étoiles : la Grande Ourse ou la constellation d'Orion... Eh bien, tout cela opère sur la théorie des ensembles... Cette figure n'opère, en tant que figure, que lorsqu'on a pris soin de relier les étoiles entre elles...

J.-M.O. – Et c'est le spectateur, pour ainsi dire, qui fait office, alors, d'opérateur...

J.-P.P. – Oui. J'ai connu des gens qui travaillaient dans un laboratoire de physique nucléaire. Ils étaient à la recherche de ce qu'ils appelaient des événements : dans une chambre à bulles, tout un système de neutrons passent en accéléré, puis explosent en se téléscopant. Et le travail de ces chercheurs était d'étudier la forme que prenait l'explosion de ces particules, et de constituer, à partit de cette expérience, plusieurs figures inédites. Ainsi, la liaison d'une multitude de points aléatoires fonde une force observable, et cette figure crée l'événement.

La peinture pourrait être appréciée dans les mêmes termes que cette figure : comme un événement tout à tait inouï, imprévisible et inconcevable avant d'avoir été réalisé, pratiquement, sur la toile.

De ce point de vue-là, il n'y aurait plus de stricte opposition entre la peinture figurative et la peinture abstraite, puisque l'une et l'autre se reteindraient dans leur désir de créer l'événement.

 

J.-M.O. – Dans vos anciennes toiles, j'ai toujours eu l'impression que vous adoptiez un cadre très rigide, une sorte d'infrastructure géométrique qui prescrivait d'avance un lieu à toutes les figures qui pouvaient y surgir : et votre travail consistait ensuite à qualifier, par la couleur, ces figures ou ces surfaces géométriques.

Aujourd'hui, ce cadre est en morceaux, comme par l'effet d'une implosion, et les contraintes formelles semblent passer au second plan : d'où peut-être ce sentiment de libération, mais aussi de jubilation qui transparaît dans vos dernières toiles...

J.-P.P. – J'ai souhaité pendant longtemps parvenir à un objet, à un tableau, qui soit comparable, dans un principe coloré, à ce que j'aimais le plus. J'ai fait, pendant des années, un effort immense pour parvenir à cet état à la fois somptueux et " minimal ". Mais cela ne me satisfait plus : j'ai l'impression d'avoir fait, dans ce type de peinture le tour de ce qui dans l'ordre du sensible m'était le plus cher. Mais il est faux de croire qu'une structure régulière et apparemment rigide soit moins libre. […].

 

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