Les livres de Jean-Michel Olivier sont disponbles sur Internet:

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et aux librairies:
Le rameau d'or

Delphica

G. Haldas

 

L'HOMME DE CENDRE
(Lausanne (CH), Éd. de l'Âge d'homme, coll. Contemporains, 1987, 213 p.)

ŒUVRES

ROMANS
L'Homme de cendre
La Mémoire engloutie
Le Voyage en hiver
Les Innocents
L'Amour fantôme
Nuit blanche

RÉCITS
La Toilette des images
La Chambre noire
La Montagne bleue
L'Enfant secret

NOUVELLES
Le Dernier Mot

ESSAIS
Lautréamont
Virus — de la photographie
L'Empire de la couleur

POÉSIE
L'Œil nu

ENTRETIEN
avec Claude Frochaux

BIBLIOGRAPHIE

CONTACT
jolivier@worldcom.ch

BARBE BLEUE DE L'ÉCRITURE par Serge BIMPAGE in L’Hebdo (CH), déc.1987.

Il y a des titres transparents, qui annoncent d'emblée la couleur. Et des titres en miroir, qui déguisent ce qu'ils recèlent. Comme L'Homme de Cendre. Simon, le narrateur, tient scrupuleusement, pendant une année, le registre muet de ses rencontres, afin de conjurer l' « arrêt de mort » lancé contre lui par une femme qui l'a quitté. Il écrit son journal pour ressusciter l'espoir, même s'il est sans doute trompeur, pour se sauver par l'écriture. Mais Simon se consumera à la brise des  « mauvais » souvenirs : l'image redoutée de Sibylle surgira là où il s'y attend le moins, au détour d'une ruelle ou au hasard d'une nouvelle rencontre, à la faveur d'un moment d'inattention, d'un ami qui prononce le nom indicible. Plus Simon tente de fuir, plus sa vie dont les multiples facettes ne sont bien sûr que des représentations plus ou moins déguisées de Sibylle, se chargera de le rappeler à sa triste condition de rejeté.

Mais Simon tente-t-il vraiment de fuir ? Il souffle lui-même sur la braise avec la masochiste et agaçante ténacité des désespérés, se plaignant, avec une rare complaisance, de ses amis, de sa solitude, de la vie enfin. Et pourtant, il n'a rien d'un désespéré. C'est là sa malice : plus il se lamente, plus il brûle en vérité de feux nouveaux, laissant sourdre malgré lui une curiosité, une passion dévorante pour les autres, qu'il masque sous une extrême et dangereuse pudeur. Les sept femmes qui gravitent autour de ce Barbe Bleue en herbe le lui rendront bien. À la fois anges et démons, elles le soumettront à l'épreuve du feu, l'arrachant à sa mélancolie, pour achever son travail de deuil. Jean-Michel Olivier, qui nous avait habitués à d'égotistes voyages au fond de ses obscures boutiques (La Chambre noire, 1982), glisse avec bonheur vers une écriture de moins en moins nombriliste, même si elle en conserve les apparences. Par ses observations, son journal fait parfois songer à celui d'Amiel, auteur qu'il vénère. Comme le chant du muezzin, son odyssée est musicale, et ses mots, comme des bas glissés sur les jambes d'une femme, sont d'une infinie délicatesse.

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